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Après les municipales de 2014, quelle intercommunalité ? Par Jean-Luc Boeuf

21 novembre 2013 | 0 commentaire

Selon les discours convenus, « l’intercommunalité a été rénovée depuis 1999 et renforcée à la fin des années 2000 ». Cela n’est pas faux, tout du moins comptablement, puisque les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) formés des communautés de communes, d’agglomération et urbaines ont des budgets cumulés supérieurs aux régions. L’état d’esprit est certainement un peu moins euphorique, tant du côté des élus que du « quarteron de la décentralisation », composé du contribuable, de l’usager, du citoyen et de l’électeur… appelé à voter dans quelques semaines.
Les mécontents de « l’intercommunalité forcée ». Ils étaient nombreux au récent congrès des maires de cette semaine ! Dans une ambiance surchauffée, de nombreux élus ont ouvert le feu sur les réformes en cours, et notamment l’achèvement forcée de la carte intercommunale, le transfert à l’intercommunalité de l’élaboration du plan local d’urbanisme (PLU) prévue par le projet de loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové (dite loi ALUR). A quelques mois des élections municipales, le climat de défiance à l’égard de l’intercommunalité n’a jamais été aussi fort, alors que jusqu’à présent les réformes relatives aux intercommunalités avaient été votées avec un large consensus. Les élus n’ont ainsi cessé de rappeler le « libre choix des communes de s’associer ou de se dissocier librement dans le cadre de la coopération intercommunale.
Le front du refus de l’échelon supplémentaire. Et si la vraie question était là ? C’est-à-dire le refus de la création d’un nouvel échelon de collectivité territoriale. En effet, comment en effet expliquer à nos concitoyens qu’il faut rationaliser le millefeuille administratif alors que dans le même temps on est en train de créer un échelon de légitimité supplémentaire ? Rappelons que, à la différence fondamentale des collectivités territoriales, les structures intercommunales n’ont que des compétences limitées, en raison du principe de spécialité. Des règles identiques de fonctionnement ont été prévues pour les 16 communautés urbaines, les quelque 200 communautés d’agglomération et les 2.500 communautés de communes. Soyons clairs pour le contribuable : c’est cette incitation et elle seule qui a rendu possible dans les années 2000le développement très vigoureux de l’intercommunalité. Entre les communes et leurs établissements publics de coopération intercommunale (EPCI), survenus des conflits de compétences, d’image et de légitimité et la notion d’intérêt communal et d’intérêt communautaire a fait l’objet de disputes sur le terrain. Partages et mutualisation de services ont donné lieu à des difficultés pratiques. Comme le vocabulaire complexe, à défaut d’être compréhensible, n’effraie pas le législateur, n’oublions pas que, parallèlement, existent des « territoires de projet » aux « structures de portage » diversifiées que sont les associations, les ententes, les syndicats mixtes et les groupements d’intérêt public. En outre, des périmètres thématiques ont été créés pour fédérer plusieurs collectivités territoriales dans des territoires de projet ciblés sur différentes thématiques telles que celles des pays, des parcs naturels et des « schémas de cohérence territoriale ».
Les questions en suspens. Des questions demeurent naturellement en suspens telles que la lisibilité des compétences, la démocratisation, et le rapport au droit communautaire, notamment pour ce qui a trait à la mutualisation des services, entre les communes et leurs intercommunalités. Le double objectif est de mutualiser les moyens et d’intervenir à la meilleure échelle, selon le principe de spécialité. Chaque type d’établissement public de coopération (EPCI) a des compétences obligatoires, optionnelles et facultatives. Rappelons que leurs compétences principales correspondent souvent à des services en réseaux comme l’eau et l’assainissement, la collecte et le traitement des déchets, le chauffage urbain, les transports collectifs et les réseaux de télécommunications. De plus, les périmètres de projet se sont multipliés.
Quel impact sur les municipales ? Le quarteron risque bien d’être perdu entre les pays, agglomérations, périmètres. Au final, le citoyen et l’électeur peuvent légitimement considérer que la démocratisation est ambiguë, puisque les instances intercommunales ne sont toujours pas élues au suffrage universel direct. Quant au contribuable, il y verra une dispersion préjudiciable des actions conduites, des coûts de fonctionnement souvent multipliés par des doublonnements de services. En voie d’achèvement, à tout la moins sur le plan quantitatif, l’intercommunalité cherche encore sa place. Mais n’oublions pas que, depuis plus de deux siècles, et jusqu’ici, c’est vers le maire et lui seul que l’on se tourne dans nos sociétés ouvertes, désenchantées et désacralisées, et qui ont perdu leurs repères
Jean-Luc Boeuf

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