Calais, les pouvoirs du maire s’effacent devant l’Etat
Violation de propriété. Non-respect du plan local d’urbanisme. Atteintes à l’environnement. Quand une commune s’en prend à l’Etat, les mots, s’ils ont encore un sens, sont forts ! Il est vrai qu’il s’agit de Calais. Par un arrêté interruptif de travaux, la maire de Calais a souhaité s’opposer aux travaux du mur anti-intrusion réalisés sur sa commune et financés par le Royaume-Uni. Qui peut gagner de cette lutte du pot de terre contre le pot de fer ? Décryptage.
Albion paiera ! L’aggravation de la situation de la jungle de Calais a obligé la France et le Royaume Uni à réagir. Pour empêcher les migrants d’accéder aux voies de circulation, il a été décidé d’ériger un mur anti-intrusion. Ce mur était demandé par la Société d’exploitation des ports du détroit (SEPD). Il est financé par l’État britannique, et ce pour un montant de près de 3 millions d’euros. Son implantation, sur le territoire de la commune de Calais, a été avalisée par la préfecture du Pas-de-Calais.
Bourgeois de Calais. Usant de ses pouvoirs d’urbanisme et de police, le premier magistrat de Calais a pris le 3 octobre 2016 un arrêté « interruptif de travaux » visant à faire cesser le chantier de ce mur végétalisé en train d’être érigé le long de la rocade portuaire, sur une distance de un kilomètre. Cet arrêté a été adressé à la Société d’exploitation des ports du Détroit (SEPD). Cette dernière disposait alors de deux mois pour s’opposer à cet arrêté, via un recours devant le tribunal administratif, procédure classique. Mais la préfecture a immédiatement répliqué, le même jour, par « un arrêté suspendant l’arrêté municipal de Calais», afin de permettre la poursuite de la construction. Dès lors, la maire de Calais a deux mois pour s’opposer à cet arrêté préfectoral. Feuilleton à suivre…
« Libre » administration ? Les arguments mis en avant par le premier édile de la ville, tels que la violation du plan local d’urbanisme, l’atteinte à la faune et à la flore, ne l’avaient pas été lors de la construction du grillage de plus de 4 mètres de haut. Ce n’est toutefois pas sur ce terrain-là que cette passe d’armes est intéressante mais sur celui de la relation entre l’Etat et les collectivités. Il apparaît alors que cet épisode n’est que la traduction du caractère limité tant des pouvoirs de police du maire que de la « libre » administration des collectivités locales tant vantée dans les manuels de droit. N’oublions simplement pas que la « libre administration des collectivités » vient buter très rapidement sur un élément simple : nous sommes dans un Etat unitaire et, en dernier ressort, les éléments qui ressortissent de la sécurité nationale relèvent de l’Etat. Dès lors, les pouvoirs du maire sont strictement encadrés par l’Etat. A un point tel que ce dernier peut se substituer à la commune.