Logique de taille, sentiment de dégradation pour les capitales dechues et nécessité d’une forte mobilisation pour faire bouger l’Etat. Telles sont les trois idées du débat sur les capitales régionales. Car cette question, faisant appel à nos racines, passionne les Français.
Logique de taille. Une certaine logique l’emporte jusqu’ici, celle de la taille, qu’elle soit économique et démographique. C’est ainsi que Lyon supplante Clermont-Ferrand, Lille passe devant Amiens, Strasbourg évince Châlons-en-Champagne et Metz, Toulouse triomphe sur Montpellier, Bordeaux passe devant Poitiers et Limoges, Dijon l’emporte sur Besançon ; sans parler des régions qui gardent leur périmètre actuel et pour lesquelles rien ne bouge donc en ce qui concerne leur capitale.
Dégradation. Ce sentiment de dégradation est particulièrement visible dans les plus éloignées des «futures ex» capitales telles que Châlons-en-Champagne, Amiens, Limoges, Clermont-Ferrand. La logique de métropolisation de l’actuel gouvernement trouve ici ses limites les plus évidentes, avec une concentration de plus en plus accrue des services autour des « métropoles – capitales de région ». Une autre logique aurait pu prévaloir, axée sur cette complémentarité entre les métropoles, lieux de concentration de richesse économique, et les capitales régionales, pivot de politiques d’un aménagement du territoire équilibrée et soucieux d’équité territoriale. Au lieu de cela, nous allons nous retrouver avec une accentuation des concentrations – tant mieux pour les heureuses élues – et la même accentuation des inégalités, au détriment de ces grandes villes moyennes.
Besoin d’une forte mobilisation pour faire bouger l’Etat ? Les actions que vont entreprendre ces capitales lésées par le découpage vont se heurter à l’État toujours centralisé. Ce dernier, constante de notre histoire, goûte assez peu cette volonté de résistance. Pour amadouer les élus récalcitrants, l’État a certes promis de transformer en communautés urbaines les « futures anciennes » capitales régionales. Cela ne fera que creuser encore un peu plus les inégalités territoriales puisque, pour financer ce lot de consolation, il va falloir prendre dans la cagnotte des dotations des autres collectivités. La mobilisation des capitales déchues pour défendre leur statut de capitale régionale indiquera aux pouvoirs publics l’état de l’union en quelque sorte de nos sociétés désenchantées.
Soyons certains que l’Etat central ne laissera pas les initiatives prospérer de façon trop forte. Et gardons à l’esprit que tout ceci sera coûteux financièrement au titre des inévitables « compensations », l’État prévoyant même d’obliger les collectivités territoriales à étudier en priorité les candidatures des futurs fonctionnaires de l’État évincés de leur poste, tout en leur demandant naturellement de réduire leurs dépenses…