Changeons notre focale sur les élections départementales ! Au-delà de « l’inventivité » de l’actuelle majorité qui reprend le nom assigné sous le régime de Vichy, dressons une typologie qui classe ainsi les départements : les menacés, les vieillissants, les spécifiques, les dynamiques contrariés et les moyens. Dans deux semaines, les élections cantonales, essentiellement abordées d’un point de vue national. Or, il s’agit bien d’élections locales. Le conseil général, qui devait disparaître sous les coups de boutoir de la modernité, devient départemental. Pour faciliter la lecture des enjeux, partons des compétences phares des départements qui, à elles seules, représentent la quasi-totalité de leurs budgets : les collèges, les routes et les actions sociales.
Trois compétences représentent aujourd’hui la quasi-totalité des actions des départements : les collèges, au nombre de 7.000 sur le territoire national ; les plus de 380.000 kilomètres de routes départementales, soit une distance supérieure à celle de la terre à la lune et les actions sociales consistant à suivre les individus fragiles de la naissance à la mort. Ces compétences, l’Etat les a exercées pendant près de deux siècles. Aujourd’hui, ce sont sur ses trois socles de compétences que nos concitoyens doivent se prononcer les 22 et 29 mars prochains. A partir de ces compétences, dressons une typologie des départements afin de voir les enjeux des prochaines années.
Les départements menacés. C’est le cas des départements de la petite couronne parisienne (Hauts-de-Seine, Seine-Saint-Denis, Val de Marne) que l’Etat entendrait bien voir s’effacer derrière la future métropole parisienne. Traqués, ils mettent en place de coûteuses lignes de défense, chronophages assurément, et pour un résultat escompté des plus incertains…
Les départements vieillissants. Les dynamiques de population ont un effet direct sur les départements. En effet, les compétences sociales des départements s’exercent à travers la petite enfance, l’enfance en difficulté, le handicap, le revenu de solidarité active (RSA) et l’allocation personnalisée d’autonomie (APA). Ces départements vieillissants sont essentiellement situés dans des trajectoires de déprise (Creuse, Corrèze, Cantal, Aveyron, Haute-Saône, Haute-Marne, Meuse, Lozère…). Outre les actions sociales, ces départements doivent financer leurs routes départementales et s’assurer du maintien de leurs collèges.
Les départements spécifiques. A Paris, on ne votera pas pour les élections départementales. Tel sera également le cas à Lyon, en raison de la mise en place du statut de métropole de Lyon, collectivité territoriale à part entière. En outre-mer, il n’y aura pas non plus d’élections départementales en Guadeloupe et en Martinique, en raison de la modification à venir de leurs statuts avec les élections régionales de la fin 2015.
Les départements dynamiques … contrariés. Paradoxalement, être un grand département avec une métropole à sa tête n’est pas forcément un avantage pour la conduite des actions futures ! C’est le cas du Nord, du Bas-Rhin, des Bouches du Rhône, de l’Hérault, de la Haute-Garonne, de la Gironde, de la Loire-Atlantique, de l’Ile et Vilaine, de la Seine-Maritime. En effet, les actions des métropoles viennent contrarier les compétences des départements, au nom des logiques périphériques. De même, le coût des réseaux et de la charge foncière rendent particulièrement onéreux la conduite des politiques de voirie départementale. Enfin, le coût des actions sociales à financer explose pour ces départements, en raison de la situation économique. En somme, ces départements cumulent les handicaps de leur taille et des contraintes sociales propres aux métropoles.
Les départements moyens. Et si finalement le salut venait des départements de taille moyenne ? L’absence de grande métropole permet à ces départements de disposer d’une vision pour leur territoire et, surtout, de pouvoir conduire des actions de développement. Leurs dynamiques démographiques leur permettent (encore) d’accueillir des populations supplémentaires, sans déséquilibrer la totalité de leurs budgets. Ces départements sont les plus nombreux. Etre un département moyen ne serait donc pas péjoratif. Bien au contraire ! Cela bien sûr ne fait pas faire oublier leurs contraintes budgétaires mais cela permet d’envisager l’avenir avec utilité.
Pour conclure, faisons une proposition simple : le conseil départemental sera demain le représentant des intercommunalités. On fera ainsi l’économie d’élections difficilement lisibles pour le citoyen. On rendrait possible la maitrise de la fiscalité par le contribuable. L’usager s’y retrouver par un nombre plus faible d’interlocuteurs élus. On ferait aussi respirer l’électeur, le mobilisant pour les seuls scrutins lisibles : les municipales, les législatives et les présidentielles.