L’ordonnance prise par le Conseil d’Etat le 26 août 2016, suspendant l’exécution d’une partie de l’arrêté du maire de Villeneuve-Loubet, réglementant l’accès à la baignade sur les plages de la commune, ne règle en aucune façon la situation de notre société. Comment pourrait-il en être autrement lorsque l’on se réfère au sens premier de cette instance qui est là, normalement, pour « conseiller l’Etat » ? Mais pas pour prendre, à la place du pouvoir politique, les décisions pour le pays. Arrêt sur image sur le difficile exercice de pouvoir de police par le maire, exercé sous le triple contrôle de ses concitoyens, du préfet et du juge.
Proximité. Dans nos sociétés désenchantées et en pertes de repères, le maire demeure ce point d’ancrage pour nos concitoyens. Sa longévité dans la durée s’explique bien évidemment par cet aspect concret, protecteur et que, depuis plusieurs centaines d’années, aucune réforme technocratique n’a réussi à supprimer. Seul élu connu, dans sa commune, de tous, il est toujours présent dans les moments douloureux. Ce fut le cas après les attaques islamistes à Paris, en janvier et novembre 2015, à Nice et à Saint-Etienne du Rouvray en juillet 2016.
Réponse(s) locale(s). Après de tels drames, et au-delà des réponses données par l’Etat au niveau national, les maires sont assaillis de demandes – légitimes et naturelles – de la part de leurs concitoyens pour obtenir davantage de sécurité, que ce soit dans la rue, dans les salles de spectacle, dans les centres commerciaux et, aussi, à la plage. En ces jours précédant la rentrée scolaire, la question se pose avec une acuité particulière pour la protection des établissements d’enseignement. Pour ce faire, le maire s’appuie sur son pouvoir de police. Ce dernier trouve son origine dans la « grande loi » municipale de 1884. Il est contrôlé par l’Etat et par le juge.
Question(s) nationale(s). Lorsque deux juridictions, l’une étant le tribunal administratif de Nice, et l’autre, le Conseil d’Etat, utilisent exactement les mêmes arguments pour rendre une décision, mais dans un sens diamétralement opposé, il est temps de se tourner vers le sommet de l’Etat, c’est-à-dire la représentation nationale, afin de prendre les mesures nécessaires. Oui, le Conseil d’Etat est la juridiction suprême. Mais, non, ce n’est pas à lui de trancher les sujets de société. Au risque sinon de se retrouver dans la situation de 1989, à l’occasion des débats sur le foulard islamique à l’école. A cette époque, le pouvoir politique national avait refusé de prendre une décision et préféré s’en remettre à une instance administrative, c’est-à-dire nommée par lui et non élue.
Pour conclure, interrogeons-nous sur un véritable changement dans les pouvoirs locaux. Au lieu de revendiquer des compétences et des moyens, ne serait-il pas temps de cesser de considérer les collectivités locales comme des incapables au sens juridique ? Et de leur confier (enfin !) un véritable pourvoir normatif.