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Paroles d’un décentralisateur

29 avril 2020 | 0 commentaire

Le 30 avril 1834 paraît à Paris Paroles d’un croyant. L’auteur en est le prêtre Félicité de Lamennais. Dans la France de Louis-Philippe, il en appelle… à l’insurrection contre l’injustice, au nom de l’Évangile. Immédiatement condamné par le Saint-Siège, il n’en continue pas moins un parcours politique : député, il sera membre de la Constituante de 1848 et rédacteur d’une proposition constitutionnelle dont l’audace décentralisatrice surprend encore.

 

Paroles d’un croyant… en la justice sociale. Ordonné prêtre au début de la Restauration, Lamennais accède à la célébrité en publiant Essai sur l’indifférence en matière de religion où il en appelle à un réveil de l’Église et à une meilleure formation du clergé. Mais, tourmentés par le souvenir de la Révolution française, les papes et évêques successifs se montrent sourds aux appels à davantage de justice qu’appellerait la situation de la classe ouvrière de l’ère industrielle naissante. D’où une rupture entre le haut clergé et la fraction libérale des prêtres et des fidèles, de Lamennais à Lacordaire et Ozanam, en passant par Lamartine.

 

Un chantre de la séparation des églises et de l’Etat. Paradoxalement, Lamennais plaide avec ardeur pour… un renforcement de l’autorité pontificale sur l’Église universelle. Il désapprouve ainsi le Concordat de 1801 qui fait des prêtres de simples fonctionnaires de l’État français. En avance de deux générations sur les républicains laïcs, il réclame rien moins qu’une séparation de l’Église et de l’État, à une époque où le nombre d’ordinations annuelles est supérieur à 2500 en France.

 

Définir les pouvoirs locaux avant ceux de l’Etat central ! Proposer une constitution. Telle est mission de l’Assemblée élue en 1848 qui en confie l’élaboration à une commission. Parmi ses membres siègent deux fervents partisans de la décentralisation, Odilon Barrot et… Félicité de Lamennais : « La centralisation c’est l’apoplexie au centre et la paralysie dans les extrémités » s’exclame-t-il. Ils proposent d’inverser l’ordre des priorités : « On devait s’attendre à ce que la première et la plus importante loi que nos législateurs républicains nous donneraient, serait une organisation municipale et départementale, vraiment libérale. Comment, en effet, comprendre une République au sommet, si l’on ne commence pas par en poser les bases dans la commune ? ». Cette proposition sera repoussée.

Il restera des propos de Lamennais un grand travail sur les législations départementales et communales qui aboutira à l’aube de la Troisième République, en 1871 pour le département et en 1884 pour la commune.

 

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