A bout de souffle. Les 400 « coûts ». Gageons qu’une nouvelle vague ferait du bien à la décentralisation, ce concept galvaudé à force de parler d’acte « 2 », « 3 », « 4 » de la décentralisation… En fait, depuis quand la décentralisation n’a-t-elle pas fait l’objet en France d’un vrai traitement prioritaire ? C’est-à-dire des mesures simples, compréhensibles pour le grand public et d’application immédiate. Et bien justement, utilisons quelques titres de films, mêmes un peu travestis, de cette époque particulière du septième art. Peut-être même que L’année prochaine à Marienbad…
À bout de souffle. L’actuelle majorité parlementaire a détricoté les apports essentiels de la loi du 16 décembre 2010, qui prévoyait l’élection du conseiller territorial, appelé à siéger en même temps à la région et au département. A la place de cette réelle et compréhensible rationalisation, un découpage régional qui génère des coûts supplémentaires et un projet de loi NOTRe (nouvelle organisation territoriale de la République) dont on cherche en vain le sens. Dernier avatar en date, le seuil des intercommunalités : 5000, 10000, 15000… Non il ne s’agit pas d’une version territoriale du Monopoly et de repasser à la case départ pour toucher les 20000 tant espérés ! Il s’agit plus prosaïquement des seuils de population que le gouvernement n’est pas capable d’imposer. Et si on raisonnait autrement ?
Les 400 « coûts » (de la décentralisation). La France compte un peu plus de 2600 communautés de communes, communautés d’agglomération, communautés urbaines et métropoles. Quelqu’un s’est-livré au décompte de temps public (donc d’argent public) passé depuis trois ans à l’Assemblée Nationale, au Sénat, dans les 6000 communes de plus de 1000 habitants ainsi que dans les 101 départements, les milliers d’intercommunalités, les préfectures de régions, de départements pour discuter à perte de vue sur les seuils à appliquer ? Après tout, c’est l’Etat lui-même qui a favorisé et incité, à la fin des années 1990, les communes à se regrouper, à coup de subventions se chiffrant en milliards d’euros. On a distribué l’argent public avant de s’intéresser aux projets. L’intercommunalité dite Chevènement (du nom de la loi du ministre qui fit voter la loi en 1999) porte en elle elle-même les conditions de ses coûts énormes. Au milieu des années 2000, de nombreuses intercommunalités cherchaient même à dépenser les recettes qui leur tombaient comme à Gravelotte… Et on voudrait qu’aujourd’hui, au nom de la nécessaire orthodoxie financière, les élus acceptent de changer le modèle sans rechigner ?
L’année prochaine à Marienbad ? On a tendance à se centrer sur la pseudo « exception française ». Mais quittons le périphérique (parisien) et regardons ailleurs, en Europe ou même un peu plus loin. L’exemple espagnol pourrait servir de référence sinon de modèle. Songeons en effet que, en moins d’une génération, l’Espagne est devenue quasiment le pays le plus décentralisé au monde. On objectera bien sûr qu’il s’agit d’un État fédéral mais alors cet Etat a réussi à diminuer fortement les inégalités entre ses provinces.de l’autre côté de la Méditerranée, la Tunisie, moins de cinq ans après la révolution de jasmin, conduit une décentralisation à marche rapide.