L’épreuve du baccalauréat de philosophie au secours de la décentralisation ? Chiche ! Appliquons aux territoires et à la décentralisation, le sujet donné ce matin aux candidats de Terminale L. A l’aide de quelques titres du prix Goncourt, tâchons de voir si le présent des territoires se sert encore du passé, avec L’Etat sauvage, A l’ombre des territoires en fleurs et Un grand pas vers le bon Dieu (territorial).
L’Etat sauvage. Une nouvelle carte administrative de la France se dessine après des décennies de stabilité. Moins de régions (mais toujours plus de dépenses publiques pour financer ce couteux caprice…), des départements renforcés (alors qu’ils étaient la collectivité à abattre il y a seulement quelques mois…) et une intercommunalité de plus en plus touffue, avec la multiplication des structures (et la promotion au rang de communauté urbaine des futures capitales régionales déchues…). De plus, un sentiment d’abandon et de déshérence parcourt les territoires, devant le départ de services publics de l’Etat et la très forte diminution, voire la quasi-disparition, des financements étatiques. Cet effacement de l’Etat renvoie dans les profondeurs de l’histoire un système administratif conçu naguère pour quadriller l’espace national à travers les préfets.
A l’ombre des territoires en fleurs. En dépit des coups de boutoir donnés à la commune, le maire demeure ce référent parce que, chaque jour, il représente celui vers lequel on peut se tourner, quels que soient sa condition, son âge, sa situation. Alors que nos sociétés sont ouvertes, désenchantées et désacralisées, chacun perçoit bien que le maire est cette personne à son écoute, à l’occasion des drames personnels, professionnels. Un incendie ? Des licenciements ? Un drame de la route ? Le maire est encore et toujours là. Alors que les pouvoirs publics ont déserté les territoires, que les entreprises voient leurs liens se distendre, le maire reste quasiment le seul interlocuteur pérenne. Cessons alors de comparer le nombre de nos communes avec le reste de l’Union européenne ! Notre pays est un vieux pays, avec ses racines, et dans lesquelles le maire figure au tout premier plan.
Un grand pas vers le bon Dieu (territorial). Le rôle joué par nos concitoyens dans les territoires est bien plus fort que par le passé. Mais cet appel à la consultation locale n’est pas récent. Déjà, les dispositions de la loi du 5 avril 1884, dite grande loi municipale, permettaient à tout habitant ou contribuable de « demander communication sans déplacement et de prendre copie totale ou partielle des procès-verbaux du conseil municipal ». En ce temps-là, les citoyens ne participent bien sûr pas directement à la décision locale. Cette dernière est d’ailleurs toute entre les mains du préfet, qui assure un contrôle a priori de tous les actes des communes. Les décisions locales sont alors placardées devant la porte d’entrée de chaque mairie. Décidément, l’avenir vient de loin…